Dans beaucoup de disciplines martiales, le combat est la finalité. Ne nous voilons pas la face et rappelons-nous qu’à l’origine les arts martiaux apprenaient à combattre et à tuer.

chau-vietnam
Heureusement, en temps de paix, les maîtres d’arts martiaux se servaient de leurs arts pour en faire une méthode d’éducation physique et mentale. La composante “combat” restait cependant une des composantes importantes de l’art. Que recherche-on dans le combat ? l’application des techniques apprises et la recherche de l’efficacité absolue. Ceci suppose que les accidents ne sont pas rares, à tel point que par le passé, les écoles d’Arts Martiaux Vietnamiens avaient coutume de pratiquer le combat UNE seule fois par mois.

Bien sûr les maîtres tentaient bien de limiter les dégâts : protection des parties génitales, enveloppement des mains avec de la paille ou de la toile de jute (l’ancêtre de nos gants), tentative de mettre le corps humain dans des armatures en bambou, ou encore contrôle de la puissance de frappe.

Un autre inconvénient se présentait dans les séances de combat : A force de rechercher l’efficacité absolue, les combattants finirent par limiter leurs techniques à quelques mouvement offensifs, voire à deux ou un coup quelconque. Il nous suffit de regarder les compétitions actuelles pour nous apercevoir de la pauvreté technique des compétiteurs ; certains combattants montent sur le podium avec quelques coups dits spéciaux.

Rappelons que l’art martial ne se résume pas à un affrontement (libre) entre deux personnes. L’éducation physique, technique et surtout mentale de notre art ne peut être résumée à une banale épreuve de force.

Alors, comment concilier l’efficacité du combat et la recherche technique, indispensable pour le côté “éducation”?

Entre le combat libre et les techniques exécutées dans le vide (ou dans les divers sacs de frappe) existent une multitude d’exercices qui se pratiquent à deux, à trois, voire plus . En voici une liste non-exhaustive :
–        Frappe retenue (ou avec légère touche) sur l’adversaire : version dite « combat avec léger contact »,
–        Frappe  retenue sur un partenaire immobile : recherche de la précision sur les points vitaux,
–        Attaque à puissance réelle sur un mannequin qu’un partenaire promène dans tous les sens (si vous n’avez pas de mannequin, un bouclier de frappe ferait aussi l’affaire)
–        Enchaînement de coups sur un adversaire qui ne contre pas : cet exercice est appelé song-luyên ou parfois improprement chiên-luoc,
–        Contre-attaque sur une offensive d’un partenaire : cet exercice appelé phãn-don  peut se pratiquer de différentes façons et de différents niveaux.

C’est ce dernier exercice que nous allons étudier aujourd’hui, mais avant de continuer, laissons passer une page de publicité. Cela ne coûte rien, cela fait audio-visuel moderne et cela permet de voir si vous êtes patient. Alors, voilà la page de publicité : « Le site taysonvodao.fr, le site que tout vrai pratiquant d’Arts Martiaux Vietnamiens se doit de consulter. Qu’attendez-vous ? Vous l’avez déjà fait ? Tant mieux, j’espère que ce n’est pas pour regarder les muscles des pratiquants en photo ». Fin de la page de publicité (jingle)

Ben, voilà, nous étions en train de discuter sur le phãn-don. D’abord, sachons ce que ces deux syllabes désignent :
–        phãn (avec un accent en forme de s couché sur le a) signifie  contrer
–        dòn (avec un accent grave sur le o) signifie attaque ou prise
–        phãn-dòn signifie contrer une attaque ou contrer une prise

En gros, voici la description de l’exercice : Un partenaire, surnommé nguoi danh (l’attaquant)
lance une attaque. Nguoi dõ’ (prononcer “gueuille deux”, càd le défenseur) réagit . L’exercice peut se pratiquer à plusieurs niveaux :
–        l’attaquant lance une attaque décidée à l’avance
–        l’attaquant lance une attaque, mais n’importe laquelle, sans prévenir
–        l’attaquant lance une attaque quand le défenseur est prêt
–        l’attaquant lance une attaque par surprise
–        l’attaquant  attaque par derrière
–        les attaquants sont au nombre de deux (voire plus) et le défenseur attend une offensive, ou deux, (voire plus) en même temps
(liste non exhaustive)

En fonction des attaques ou de l’ attaquant, le défenseur doit réagir, ou anticiper avec  des mouvements de contre-attaque. Mais il doit aussi travailler :
–        ses positions et sa stabilité
–        sa puissance de frappe ( mais en retenant les coups bien sûr),
–        son timing, çàd sa faculté de faire les choses au bon moment,
–        la logique de sa réponse à l’attaque
–        sa détermination, soulignée par son regard
–        et à un certain niveau, l’esthétique de sa réponse à l’attaque.

Dans nombre d’écoles, le maître ou l’instructeur demande à l’élève-défenseur de pratiquer des mouvements de défense appris par cœur, un peu comme s’il s’agissait d’un quyên. Personnellement (excusez-moi de parler de moi) je préfère laisser le libre arbitre aux nguoi-do (défenseur ) pour les raisons suivantes :
–        si le défenseur a réellement assimilé les leçons de parade, de contre-attaque ou d’esquive, il est capable de « sortir » une contre-offensive de qualité, sans que son maître soit obligé de lui dire ce qu’il faut faire ou ne pas faire .
–        la façon de répondre à une attaque obéit à des critères différents selon les individus (différence de tailles, de poids, de cultures, de sensations, de niveaux techniques …)
–        dans ce genre d’exercice, qui n’est pas un combat, mais qui prépare au combat, le défenseur doit sentir par lui-même ce qui est efficace et ce qui ne l’est pas !

L’article est assez long déjà, non ? Et vous avez de quoi faire pour méditer, mais si vous voulez qu’on en reparle, de ce phãn dòn, eh bien… demandez-le au zèbre-masse-t-heure.